Le point de départ de ce carnet
PAR JOSÉE FISET
Pour les enfants qui n’ont pas connu que la noirceur du bitume et la « jauneur » de l’autobus scolaire, le 24 juin est soudé au bonheur de quelques souvenirs puissants, indélébiles : l’odeur des pivoines (les foncées, qu’on disait roses Kennedy, étaient celles qui sentaient le plus fort), le goût des minuscules fraises des champs (tièdes, fragiles et 13 fois et demie plus goûteuses que le fruit cultivé) et le craquant des « bâtons » de rhubarbe, qui étaient de la même couleur que le fond de nos poches, tapissées de fraises écrasées, sucrées. Citron que c’était bon ! A contrario, mes mois de septembre étaient couleurs de miel, de marrons et d’avoine alors que la rentrée scolaire renouait avec le privilège d’un rituel sacré : le gruau chaud avec des rôties au beurre salé. Le bonheur reposait, et repose toujours, sur la science du non-brassage de la cuillerée de cassonade, du nuage de cannelle et de la micromare de lait flottant sur la bouillie, un mini-peu salée. Septembre, c’était aussi la porte du four ouverte sur une tôle à biscuits couverte d’avoine rôtie caramélisée, d’amandes effilées et de noisettes grillées. À chaque saison ses inspirations. L’avoine, bienfaisante et humble céréale, est cette richesse qui a fait germer le présent carnet.